La banane dessert Made In Africa à l’assaut de l’Europe

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La banane dessert. L’une des multiples variétés de fruits et légumes cultivée en Afrique intéresse l’Europe. Certes, l’hégémonie, en cette matière, de l’Amérique Latine et des Caraïbes est incontestable. Cependant, la qualité indéniable de la banane produite sur le Continent est, sans aucun doute, l’atout premier qui joue en sa faveur, sur le marché International. C’est la raison pour laquelle l’Allemagne, l’un des poids lourds de l’Europe, se penche, de plus en plus, sur le potentiel de la banane dessert Africaine. Ainsi que sur les divers fruits et légumes produits en terre mère. Durant le mois de juin 2023, les membres du Groupe parlementaire Afrique de l’Ouest du Bundestag étaient en Côte d’Ivoire pour un voyage d’étude.

Terminal fruitier d’Abidjan. 29/06/2023. Côte d’Ivoire

Lors de celui-ci, ils ont visité, notamment, des plantations de cacao. Et ont aussi eu des séances de travail avec leurs homologues Ivoiriens. Le 29/06/2023, la délégation Allemande et des députés Ivoiriens se sont rendus dans une plantation de bananes. Puis au terminal fruitier d’Abidjan. Ainsi, du planting au bourgeon, en passant par la récolte puis l’empotage au quai fruitier, ils ont exploré toute la chaîne de production de ce fruit riche en vitamines, aux nombreuses applications cosmétiques. Enjeux commerciaux, sociaux et environnementaux ? Strat’Marques dévoile, dans ce dossier exclusif, la stratégie de conquête de la banane dessert Made In Africa.

Un poids lourd de l’Europe à la découverte de la chaîne de production de la banane dessert Africaine

La veille, le temps avait été plutôt clément. Comme si le ciel avait cessé de pleurer pour célébrer. Célébrer, avec la communauté musulmane de Côte d’Ivoire, la Tabaski (Aïd el-Kebir). Alors que le pays digérait, sous une pluie battante, les mets et moments partagés à l’occasion de la grande fête du sacrifice (Aïd al-Adha), des parlementaires, du Bundestag et de Côte d’Ivoire, étaient dans les champs. Pour ces députés Allemands, plus qu’un voyage d’étude sur le terrain, l’objectif était surtout de voir, de leurs propres yeux, la chaîne de production de la banane dessert Made In Africa. Et pour ce faire, c’est la Côte d’Ivoire qu’ils ont choisi.

Il faut dire que cette étape pratique, effectuée dans le cadre de la collaboration Nord/Sud, facilitée par Afruibana, englobe plusieurs enjeux stratégiques. Tout d’abord, si l’association panafricaine des exportateurs et producteurs de fruits Africains a porté son choix sur la Côte d’Ivoire, pour accueillir ce voyage d’étude, c’est en raison de son positionnement. Et pour cause. Reconnue au plan mondial pour sa production de cacao, café, coton, anacarde… La banane dessert de la locomotive de l’Afrique de l’Ouest affiche, également, de belles performances. Puisqu’elle est leader parmi les pays producteurs de ce fruit en Afrique. Un élément qui explique, d’ailleurs, son rôle phare au sein des différentes filières horticoles de la nation éburnéenne.

La banane dessert Ivoirienne présentée comme exemple de la filière Africaine

En effet, la banane dessert Ivoirienne, à elle seule, pourvoit plus de 13.000 emplois directs. Et génère près de 25.000 emplois indirects. De plus, ses exploitations agricoles induisent la création d’infrastructures stratégiques. Des infrastructures telles que des routes, des écoles, des centres de soin… En terme de production, la filière Ivoirienne présente, en outre, des chiffres intéressants. Avec un ratio, plus ou moins constant, de 400.000 tonnes en moyenne par an, plus des trois quarts (320.000 tonnes) de ce volume est exporté vers le marché commun Européen. D’où l’intérêt de l’Allemagne. Clairement, il s’agit donc d’une filière importante et structurante. Mieux, d’une culture dynamisante du secteur agricole. Et, par ricochet, de l’attractivité de la terre d’éburnie et de l’Afrique.

Néanmoins, la filière de banane dessert Made In Africa est un petit poucet. Chétive face à la super concurrence Latino-Américaine et ses 15 millions de tonnes produites par an. Dont 4,6 tonnes sont exportées vers l’Union Européenne. Soit 14 fois les quantités Ivoiriennes. Cette concurrence asymétrique crée une pression constante. Une pression propice à un climat d’affaires en déséquilibre et à la baisse des prix. Pour se départir de cette domination sans partage, depuis 06 ans maintenant, les producteurs Africains se sont réunis au sein d’une association Panafricaine. Son nom ? Afruibana. Une association qui a fort à faire. Car, dans un contexte déjà loin d’être évident pour l’Afrique, l’Espagne assure, depuis le 01/07/2023, la présidence tournante du conseil de l’UE.

La position dominante de l’Amérique Latine et des Caraïbes

Par conséquent, pendant 06 mois, c’est la péninsule Ibérique qui définit l’agenda de l’Union. Ainsi que ses priorités. Or, il parait évident, étant donné une histoire commune avec sa couronne, que cette présidence tendra non seulement à privilégier le développement des relations et échanges commerciaux avec les pays de l’ALCrégion Amérique latine et Caraïbes. Mais également à remettre particulièrement sur la table l’accord de libre-échange avec les pays du Mercosur. Et cela, conformément à la volonté, de l’UE, de renforcer son partenariat stratégique avec cette zone. Via des investissements encadrés par le Global Gateway.

A l’heure actuelle, des tractations sont menées pour parachever ces fameux accords UE/Mercosur. Toutefois, une fois ces partenariats commerciaux échafaudés, les autre étapes seront, premièrement, le renforcement de la coopération entre l’UE et l’ALC, au sein de l’OMC Organisation Mondiale du Commerce. Et, dans un deuxième temps, l’intensification des efforts mondiaux pour la diversification des sources de matières premières. Le tout, afin d’accroître la résistance des chaînes d’approvisionnement mondiales. Pour ce faire, l’UE entend poursuivre sa collaboration avec ses partenaires de l’ALC. Pour œuvrer à la création de conditions d’investissement durable. En tout état de cause, plusieurs points sont à l’ordre du jour. Notamment :

  • L’impact de la législation Européenne sur le Green Deal
  • Le soutient aux cadres juridiques ouverts, stables et prévisibles

Dans cette perspective, sachant que la mise en œuvre de la ZLECAf va bon train, la visite de ces parlementaires Allemands était, également, l’occasion opportune pour les sensibiliser à la place de l’Afrique sur l’échiquier. Et, de facto, la nécessité d’approfondir les échanges avec le Continent. Spécialement en ce qui concerne la banane dessert Africaine. Et, tant qu’à faire, les autres fruits et légumes de qualité Made In Africa. En conséquence, Afruibana et la Côte d’Ivoire ont mis autant l’accent sur la qualité que sur les conditions sociales et environnementales de production de ce produit d’appel.

Terminal fruitier d’Abidjan. 29/06/2023. Côte d’Ivoire

A cet égard, il convient de souligner que, sur le volet social, les producteurs Africains se distinguent. Comment ? Et bien par une promotion active du dialogue social. Un dialogue matérialisé, dans les faits, par une forte activité intersyndicale. A titre d’exemple, cette action continue a permis à la première association nationale des travailleurs Ivoiriens de la banane de voir le jour, en février 2023. C’est donc, conformément à cet engagement, que les membres du bureau exécutif de ladite FETBACI étaient au côté de la délégation Allemande, ce 29/06/2023, lors de l’ensemble de cette journée de visite. Non seulement pour échanger avec ces représentants du Bundestag. Mais également pour témoigner des enjeux du secteur. Et aussi exposer la démarche globale de la filière de la banane dessert Africaine. Une démarche avec, pour socle de valeur :

  •  L’amélioration des conditions de vie des travailleurs, de leurs familles et des communautés locales
  • La Tolérance zéro quant au travail des enfants et au travail forcé.
  • L’impact positifs sur les lieux d’exploitation. Grâce au développement d’infrastructures d’accès à des services de base (eau, éducation, santé, logement, etc.)
  • L’essor du tissu économique local en stimulant et en encourageant l’agripreneuriat
  • La parité femme-homme au sein des structures de gestion
  • L’autonomisation des femmes

Au niveau environnemental, conscients de l’urgence climatique, cela fait plus de 10 ans que les producteurs Africains ont démarré leur transition agroécologique. Près d’une décennie après la prise de ce virage, ils souhaitent, aujourd’hui, monter d’un cran. C’est pourquoi, en partenariat avec le CIRADCentre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement, Afruibana travaille sur un projet de bananes desserts agroécologiques. Précisément sur les territoires Ivoirien, Camerounais et Ghanéen. La triple ambition derrière cette entreprise :

  • Améliorer la performance environnementale des plantations
  • Réduire les coûts de production
  • Augmenter les rendements

Pour l’heure, des discussions, placées sous l’égide du Forum mondial de la banane, se déroulent autour du concept de la responsabilité partagée. Selon cette conception, le risque et la valeur sont équitablement répartis tout le long de la chaîne d’approvisionnement. De la sorte, les agriculteurs supportent les coûts avec les acheteurs. Et récoltent les fruits de pratiques agricoles plus durables. Il faut savoir que, en l’état actuel des choses, le risque pèse majoritairement sur les producteurs. En effet, la grande distribution utilise la banane dessert comme produit d’appel. Et se gardent 30 à 40 % du prix. Une situation qui, en temps de transition, est difficilement tenable. Et encore moins acceptable. Sachant que le salaire décent  figure à l’objectif 8 des ODD – Objectifs de Développement Durables.

Le rôle stratégique du Terminal Fruitier d’Abidjan

Jean-Marc Yacé

C’est en fin de journée que le groupe parlementaire Allemand a visité le Terminal fruitier d’Abidjan. Géré par EOLIS Agence maritime membre du groupe Compagnie Fruitière, celui-ci joue un rôle stratégique dans les relations UE/Afrique. Disposant d’infrastructures et d’équipements adaptés lui permettant de répondre aux enjeux spécifiques liés à ces denrées périssables, il traite plus de 500.000 tonnes de fruits chaque année. Pour Jean-Marc Yacé, Directeur Général d’EOLIS CI « Ce voyage d’étude, en Côte d’Ivoire, permet à l’Allemagne, l’un des poids lourds de l’Europe, d’apprécier, sur place, la qualité de notre banane et de sa chaîne de production. Sur un marché dominé par l’Amérique Latine et les Caraïbes, cette visite doit leur faire prendre conscience de la nécessité d’augmenter la part de la banane Africaine et son prix sur le marché commun Européen. »

UN PLAIDOYER POUR UN PRIX JUSTE ET ÉQUITABLE
Joseph Owona Kono interrogé par des journalistes. Terminal fruitier d’Abidjan. 29/06/2023. Côte d’Ivoire

Joseph Owona Kono, président d’Afruibana et instigateur de ce voyage l’a indiqué, ce jour-là. L’Europe est le principal marché de débouché, à l’export, pour la banane dessert Africaine. Son plaidoyer est celui d’un prix juste et équitable sur ce marché. Il espère que, après ce qu’elle a observé, la délégation Allemande se fera porte-parole. Mieux, Ambassadrice de sa cause. Quant au Docteur Karamba Diaby, Président du Groupe Parlementaire pour les pays de l’Afrique de l’Ouest du Bundestag, il s’est exprimé sur cette visite, en sa qualité de chef de délégation. « De la graine, du planting, au bourgeon, à la récolte, au transport et à l’embarquement (…) Nous avons pu suivre toute la chaîne de production de la banane Africaine (…) Il est important que les conditions de travail et que les niveaux de salaires suivent (…) Et nous sommes résolument engagés, mes confrères et moi, sur cette voie (…) »

Docteur Karamba Diaby au micro de journalistes. Terminal fruitier d’Abidjan. 29/06/2023. Côte d’Ivoire
Dès 2024, la taxe européenne carbone s’appliquera au transport maritime. Si l’Afrique est, géographiquement, plus proche de l’UE que l’Amérique Latine, elle ne sera pas, pour autant, exempte d’une augmentation des coûts. Une augmentation des coûts de transport liée, en l’occurrence, à la mise en application de cette taxe. Et ce, alors qu’elle est plutôt en position dominée que dominante sur ce segment. Au moment où la lutte contre le réchauffement climatique s’intensifie, comment, celle considérée naguère comme la cinquième roue du carrosse, peut-elle concilier conscience écologique et urgence climatique ?

 

KOFFI-KOUAKOU Laussin

Rédacteur en chef

 

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